La mise en place d’une politique d'achats responsables ne doit pas apparaître comme une contrainte mais peut offrir des avantages concrets. La rigueur de ses critères permet de renforcer la maîtrise et le contrôle des achats. Elle permet de valoriser les engagements et les actions réalisées par l’entreprise vis-à-vis de ses clients. C’est aussi un levier de co-construction avec les fournisseurs et l’occasion de tisser des liens durables.
Ainsi, une politique achats responsables permet de partager une même vision et un même objectif de réduction de l’empreinte environnementale et de valorisation de l’impact social avec l’ensemble de sa chaîne de valeur.

Etape 1 : Structurer la politique achats responsables selon des normes communes
Plusieurs normes peuvent servir d’appui à la définition d’une politique achats responsables. En voici trois exemples, du plus généraliste au plus spécifique et concret :
- ISO 26000 : bien qu’étant non certifiable, la norme ISO 26000 offre un cadre clair pour déployer, plus généralement, une politique RSE, suivant sept axes communs à toute démarche RSE, et à son reporting : gouvernance, Droits de l’Homme, conditions de travail, environnement, loyauté des pratiques, consommateurs, communautés et développement local.
- NF X50-135-1 : cette norme prolonge les principes de l’ISO 26000 dans un cadre spécifique aux achats. Des recommandations et propositions d’action sont adressées aux acheteurs, suivant une optique de gestion et contrôle des coûts et d’anticipations des risques, qu’ils soient de nature économique, sociale ou environnementale (les trois piliers du Développement durable).
- ISO 20400 : cette norme permet d’intégrer les critères RSE aux processus d’achat et s’accompagne de bonnes pratiques. Elle adresse plus spécifiquement les achats d’équipements numériques en proposant des moyens d’évaluer l’impact environnemental et social, en plus de l’économique.
Etape 2 : Réaliser l’inventaire du parc informatique et des projets et pratiques IT
La première étape à toute action de construction d'une politique achats responsables est la réalisation d’un état des lieux. Cela permet d’établir des valeurs et indicateurs de départ, en vue d’évaluer la bonne réalisation du programme, en particulier dans une logique d’amélioration continue.
Dans une approche dite « IRO » (Impacts, Risques et Opportunités), il est possible d’identifier les impacts négatifs et positifs, et ainsi de mettre en place des actions spécifiques de couverture des impacts négatifs et de valorisation des impacts positifs en s’appuyant sur les opportunités de développement.
Globalement, les émissions de gaz à effet de serre liées aux achat IT sont réparties entre les équipements (infrastructure, terminaux, etc.) et les services (dans une approche type SaaS). La grande majorité de ces émissions provient des équipements, dans leur phase de production et de fin de vie, beaucoup plus que dans les phases d’usage.
Il convient, logiquement, de débuter sa démarche de construction d'une politique achats responsables par un bilan carbone du parc informatique. Cette démarche s’appuie sur des analyses de cycle de vie (ACV) des équipements achetés, ou des infrastructures qui peuvent héberger les services de type SaaS. En cas d’absence de donnée, il est alors nécessaire de réaliser son propre ACV, sur l’ensemble du cycle de vie du matériel acheté, de l’extraction de matières premières à la fin de vie, en passant par le transport et la fabrication.
Cette étape d’état des lieux doit idéalement s’accompagner d’un constat d’étonnement et d’expression de toutes les interrogations qui peuvent émerger. Celles-ci servent à identifier les interrogations à partager aux fournisseurs, ainsi que les sources les plus critiques d’émissions de gaz à effet de serre, ce qui permettra de définir sa politique achats responsables.
Etape 3 : Définir un plan d’action et un catalogue réutilisable pour sa politique achats responsables
Sur la base du diagnostic initial, il convient de définir un ensemble de solutions possibles en amont de sa politique achats responsables. Celles-ci se structurent autour d’objectifs de performance et temporels clairs. L’objectif n’est pas de projeter et adopter l’ensemble des actions possibles, mais de se concentrer sur les plus réalisables et efficaces dans un délai acceptable.
Ces actions peuvent se répartir suivant différents axes :
- Conditions de travail : le choix de fournisseurs peut inclure des critères spécifiques aux conditions de travail des collaborateurs du fournisseur. Sur le marché français, il est par exemple possible de s’adresser à des entreprises issues de l’Économie Sociale et Solidaire (ESS). Différents labels permettent d’identifier des acteurs, tels que le label Numérique Responsable, l’Ecolabel européen, TCO Certified et EPEAT sur les achats d’équipements informatiques.
- Achats locaux, reconditionnés, recyclés, upcyclés, etc. : le premier critère de diminution des émissions des émissions de l’IT étant la production des matériels, toute mesure permettant ou facilitant la réparation et l’évolution des produits est de première importance, de même que la mise à disposition de produits reconditionnés.
- L’ACV, pierre angulaire de l’évaluation des émissions : l’ACV multicritère est nécessaire à l’évaluation des émissions de la chaîne de valeur. Ainsi, il convient, dans un premier temps de privilégier les fournisseurs qui fournissent des ACV complètes et transparentes. Sur cette base, il est ensuite possible d’effectuer une sélection des mieux-disants.
- Ecoconception de services numériques : il est utile de rapprocher la démarche d’achats responsables de celle d’écoconception de services numériques, tant à l’interne qu’à l’externe.
- Optimiser la gestion matérielle : de même, se rapprocher des services de maintenance et de gestion du parc informatique est nécessaire. Cela permet de corréler les pratiques et objectifs d’usage sur les achats, et vice versa.
Etape 4 : Communiquer sa politique achats responsables
La politique achats responsables doit être communiquée de manière transparente, tant à l’interne qu’à l’externe. Il est communément admis de concevoir, communiquer et faire signer une charte achats responsables. De même, la charte peut être accompagnée d’ateliers ou parcours de formation et sensibilisation auprès des collaborateurs, en particulier proches des achats.
Etape 5 Définir la feuille de route de sa politique achats responsables
La politique achats responsables est une étape importante, mais qui doit s’inclure dans le développement d’une stratégie, et une approche opérationnelle. Plus généralement, il est donc nécessaire de co-construire une feuille de route dite Numérique Responsable ou Green IT, et d’y lier des objectifs clairs.
En effet, les achats responsables sont un des cinq piliers du numérique responsable :
- Sobriété numérique ;
- Eco-conception des services numériques ;
- Inclusivité et éthique du numérique ;
- Formation et sensibilisation ;
- Economie circulaire et achats responsables.
Utiliser sa politique achats responsables comme levier de performance
La politique achats responsables, à l’image de l’ensemble d’une stratégie Green/RSE, sert à fédérer les collaborateurs et l’ensemble de la chaîne de valeur autour de valeurs communes. Au-delà du symbole et de la conformité, elle est un levier de performance. En particulier, elle permet de réduire les risques sur la chaîne d’approvisionnement, de renforcer l’image et réputation de l’entreprise auprès de ses parties prenantes tout en favorisant l’efficacité opérationnelle et en fournissant des nouveaux indicateurs de performance.
L’objectif de la conception d’une charte achats responsables doit être de privilégier une vision d’engagement à long terme en se positionnant comme leader sur son secteur.
Enfin, une charte achats responsables, et les dispositifs qui l’accompagnent, sont aussi. Des moyens de permettre de répondre aux exigences de conformité de son organisation, comme de celles de sa chaîne de valeur, en particulier dans un contexte de forte augmentation de la pression légale que traduit, par exemple, la récente CSRD.